Vendredi 7 février 2020 – Pendant des siècles, les femmes ont largement contribué à la science. Elles ont découvert des remèdes qui ont permis de sauver des vies, mis au point des inventions qui ont bouleversé le monde, et mené à bien des études d’une portée considérable. Mais, dans de nombreux cas, leurs significatives avancées sont minimisées, voire négligées.
Pendant trop longtemps, les domaines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STIM) ont été façonnés par des préjugés sexistes qui ont exclu, excluent et continueront à exclure les femmes et les filles. L’inégalité d’accès à l’éducation, aux technologies et aux postes de direction a écarté les brillants cerveaux féminins des carrières afférentes aux STIM et bloqué leur progression.
En dépit de ces revers, chaque jour, des femmes et des filles créatives et tenaces repoussent les limites de la connaissance scientifique à la recherche de solutions aux enjeux complexes de dimension mondiale. Leurs travaux ont modifié notre façon d’appréhender le monde, et leurs histoires méritent d’être racontées encore et encore.
Les percées scientifiques qui en découlent reflètent leurs instigatrices. L’écart entre les sexes qui prévaut dans le domaine des sciences, des technologies et de l’innovation se traduit par des talents perdus, des découvertes inexploitées et des solutions biaisées.
Voici l’histoire de sept femmes scientifiques que vous devez connaître et à qui rendre hommage à l’occasion de la Journée internationale des femmes et des filles de science.
Tu Youyou
Tu Youyou est une chimiste pharmaceutique dont la recherche visionnaire sur le traitement du paludisme trouve son origine dans la médecine traditionnelle chinoise. Sa découverte de l’artémisinine, un composant qui réduit le nombre de parasites plasmodium présents dans le sang des patients atteints de paludisme en un temps record, a sauvé des millions de vies.
Credit: Daria Koshkina
Alors qu’elle était étudiante en pharmacologie, Youyou a appris à répertorier les plantes médicinales, à en extraire les ingrédients actifs et à en déterminer les structures chimiques. Elle a passé les premières années de sa carrière dans les forêts tropicales de la Chine du Sud à étudier les conséquences dévastatrices du paludisme et à examiner d’anciens textes médicaux sur les traitements traditionnels chinois de la maladie.
Après des années de recherche, Youyou et son équipe ont finalement trouvé une référence à l’armoise, utilisée en Chine environ 400 ans apr. J.-C. pour traiter les fièvres intermittentes, un symptôme du paludisme. Ils ont extrait puis testé le composant actif de l’artémisinine et publié leurs résultats. Aujourd’hui, l’Organisation mondiale de la Santé préconise une thérapie combinée à base d’armoise comme première ligne de défense contre le paludisme.
« C’est le rêve de tout chercheur scientifique de rendre service à l’humanité », dit Youyou.
En 2015, elle et ses deux collègues ont conjointement reçu le prix Nobel de physiologie ou médecine, faisant d’elle la première lauréate chinoise du prix Nobel de cette catégorie et la première femme chinoise à recevoir un prix Nobel toutes catégories confondues.
La découverte de Youyou continue de sauver des vies tous les jours. Cliquez ici pour en savoir plus sur son travail extraordinaire.
Kiara Nirghin
« Depuis que j’étais toute jeune, j’aimais poser des questions pour comprendre comment le monde fonctionne », dit Kiara Nirghin, 19 ans, et lauréate du prix Google Science Fair 2016 pour avoir créé un polymère super absorbant capable de conserver plus de 100 fois sa masse et potentiellement apte à révolutionner la conservation de l’eau et à protéger les cultures pendant les périodes de sécheresse. Mieux encore : il est peu coûteux et biodégradable, fait d’écorces d’orange et de peaux d’avocat.
L’intérêt de Kiara Nirghin pour la conservation de l’eau émane de son expérience de la sécheresse de 2015 dans son pays d’origine, l’Afrique du Sud. Elle a été frappée de voir les barrages d’eau, auparavant pleins à ras bord, à sec, et elle s’est sentie frustrée du manque de solutions au problème. « J’ai toujours su que je devais faire quelque chose pour résoudre la sécheresse parce que personne d’autre ne faisait quoi que soit », a-t-elle déclaré à l’occasion de la Journée internationale des femmes 2019.
La découverte de Kiara Nirghin pourrait avoir une portée bien au-delà de sa ville natale. Appliqué aux champs agricoles, son polymère super absorbant pourrait augmenter la sécurité alimentaire du monde entier.
Kiara Nirghin poursuit ses recherches et ses études à l’Université de Stanford et invite les jeunes filles à poursuivre leur intérêt pour la science et les technologies : « il incombe à chacun d’impliquer les filles dans la science. Je pense que chaque idée a fondamentalement le pouvoir de changer notre monde. »
En prêtant sa voix à la campagne Je suis Génération Égalité d’ONU Femmes, Kiara Nirghin a dit : « Nous pouvons encourager plus de femmes et de filles à poursuivre une carrière dans les domaines des STIM en mettant en valeur des modèles plus positifs et des exemples de réussite féminins. Ces modèles revêtent une importance particulière pour les jeunes filles et scientifiques en herbe, car ils sont la preuve qu’elles aussi peuvent réaliser leurs rêves. »
Regardez son interview conjoint avec la lauréate du prix Google Science Fair 2015 Olivia Anne Hallisey en direct sur Instagram en 2015 pour en savoir plus sur la découverte et l’expérience de Kiara Nirghin en tant que fille investie dans les STIM.
Katherine Johnson
Katherine Johnson est une mathématicienne dont les calculs ont joué un rôle majeur dans l’exploration spatiale américaine. En tant que chercheuse scientifique de la NASA, Katherine Johnson a calculé les trajectoires, les fenêtres de lancement et les chemins de retour d’urgence qui ont permis de transporter les premiers astronautes américains dans l’espace et l’orbite terrestre.
Credit: Daria Koshkina
« J’ai toujours été très curieuse. Je voulais comprendre ce qu’il se passait autour de moi et pourquoi. Il était important pour moi de comprendre le pourquoi du comment », explique Katherine Johnson pour décrire sa volonté de repousser les limites du possible.
Elle a été la première femme afro-américaine à suivre des études supérieures dans son école et l’une des rares femmes afro-américaines à travailler sur le programme spatial de la NASA. Elle a été victime de discrimination en raison de sa race et de son sexe, mais elle savait pertinemment bien qu’elle avait sa place dans l’équipe. « Ils se sont habitués à mes questions et à ce que je sois la seule femme parmi eux », confie-t-elle.
Aujourd’hui, à l’âge de 101 ans, Katherine Johnson reste fermement engagée en faveur de la cause des femmes et des filles dans les domaines des sciences et de la technologie. « Les filles sont capables de faire tout ce que les hommes sont capables de faire », dit-elle.
Elle encourage celles que sa carrière de pionnière inspire à poursuivre leurs propres intérêts : « Découvrez ce qui vous fait rêver et donnez le meilleur de vous-même. Parce que si vous aimez ce que vous faites, vous réussirez ».
Marie Curie
Marie Curie était une physicienne et chimiste dont la recherche sur la radioactivité a posé les fondations de la science nucléaire moderne, des rayons X à la radiothérapie pour le traitement du cancer. Elle a été la première femme à remporter le prix Nobel, et la première personne à recevoir deux prix Nobel dans des disciplines scientifiques différentes.
Credit: Daria Koshkina
Marie Curie a fait des études universitaires dans sa Pologne natale et obtenu un diplôme de doctorat à l’Université de Paris. Elle et son mari Pierre ont découvert deux éléments radioactifs, le polonium et le radium. Elle a fondé un institut de recherche médicale à Varsovie et inventé des unités de rayons X mobiles qui ont aidé plus d’un million de soldats blessés lors de la Première Guerre mondiale.
Marie Curie ne connaissait pas les risques encourus dans le cadre de sa recherche. Elle a fini par mourir d’une maladie radio-induite, mais ses découvertes continuent de sauver des vies encore aujourd’hui.
Encourageant tout un chacun à poursuivre ses passions avec curiosité et courage, Marie Curie a dit : « rien dans la vie n’est à craindre, tout doit être compris. Il est temps d’améliorer notre compréhension du monde pour avoir moins à craindre ». Son héritage continue d’inspirer les femmes et les filles dans les domaines des sciences et de la technologie aujourd’hui.
Marcia Barbosa
Marcia Barbosa est une physicienne brésilienne connue pour ses recherches sur les structures complexes de la molécule d’eau. « L’eau est étrange », dit Marcia Barbosa, qui pense que les anomalies de la molécule pourraient permettre de résoudre les problèmes de pénurie d’eau douce.
Marcia Barbosa a développé une série de modèles des propriétés de l’eau potentiellement capables d’améliorer notre compréhension d’un grand nombre de sujets tels que la façon dont les tremblements de terre se produisent, comment les protéines se replient, comment produire une énergie plus propre et comment traiter certaines maladies. En 2013, elle a obtenu le Prix L’Oréal-UNESCO pour les femmes et la science.
Outre ses recherches remarquables, Marcia Barbosa s’est engagée à uniformiser les règles du jeu pour les femmes et les filles dans les STIM. Elle a organisé plusieurs conférences sur les femmes dans le domaine de la physique et est l’auteur d’articles sur la diversité géographique et la parité dans le domaine des sciences. Elle a également donné des séminaires qui ont analysé l’absence de femmes dans ce domaine.
Inspirez-vous de l’activisme de Marcia Barbosa et relayez votre engagement en faveur de l’égalité des chances et d’accès à l’éducation pour les femmes et les filles en utilisant le hashtag #WomenInScience.
Segenet Kelemu
Segenet Kelemu est une phytopathologiste moléculaire dont la recherche de pointe a pour but d’aider les petits exploitants agricoles à travers le monde à produire plus de nourriture et à sortir de la pauvreté.
Credit: Daria Koshkina
« Mon facteur de motivation consiste à vouloir transformer la vie des gens et améliorer l’agriculture en Afrique », confie-t-elle.
Segenet Kelemu a grandi dans une famille d’agriculteurs pauvres en Éthiopie et a été la première femme de sa région à obtenir un diplôme d’études supérieures. « Dans mon village, les filles étaient mariées très jeunes, mais j’étais fort heureusement trop rebelle pour que quelqu’un veuille organiser un quelconque mariage pour moi », dit-elle en riant. « J’étais vraiment déterminée à aller à l’université. »
Après des années d’études et de travail à l’étranger, Segenet Kelemu est retournée en Afrique pour diriger une nouvelle génération de scientifiques. « Je pense qu’investir dans l’agriculture africaine et la recherche africaine revient à investir dans l’humanité dans son ensemble », dit-elle.
Segenet Kelemu a reçu le Prix L’Oréal-UNESCO pour les femmes et la science en 2014, et a été nommée l’une des 100 femmes africaines les plus influentes par le magazine Forbes Afrique. Elle a également été élue membre de l’Académie des sciences du monde en 2015.
Femme de nombreuses premières et héroïne dans son domaine, Segenet Kelemu nous pousse à travailler à dessein et avec dévouement pour les causes qui nous sont chères.
Maryam Mirzakhani
Pendant sa jeunesse à Téhéran, en Iran, Maryam Mirzakhani rêvait de devenir écrivaine. Ce n’est qu’au cours de ses années de lycée qu’elle s’est découvert un talent pour les mathématiques, une matière qui a capté sa créativité et son intellect le reste de sa vie durant.
Credit: Daria Koshkina
En 1994, Maryam Mirzakhani est devenue la première étudiante iranienne à remporter la médaille d’or à l’Olympiade internationale de mathématiques obtenant 41 points sur 42, et en 2015, à nouveau candidate, elle a remporté la médaille avec un score parfait.
Elle a obtenu un doctorat à l’Université de Harvard et a été une grande spécialiste de la dynamique et de la géométrie des surfaces complexes. En 2014, elle est devenue la première femme à remporter la médaille Fields, la récompense la plus prestigieuse en mathématiques.
« Plus je consacrais mon temps aux mathématiques, plus cela me plaisait », affirme Maryam Mirzakhani en parlant de ses recherches. Elle se souvient de « son excitation de la découverte et du plaisir qu’elle éprouvait lorsqu’elle comprenait quelque chose de nouveau, du sentiment d’être au sommet d’une colline et d’avoir une vue dégagée. »
Malgré sa mort survenue en 2017, ses précieuses contributions dans le domaine des mathématiques perdurent, et sa carrière hors du commun a ouvert la voie pour les nombreuses femmes mathématiciennes à venir.