Le kokoratisme, riche ou pauvre, national ou étranger, tout le monde en fait les frais !

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By Rezo Nodwes -24 septembre 2019

Tous les acteurs de la vie nationale, du démuni au nanti, du citoyen de Trou Chouchou au premier mandataire de la République, du terroir comme de la diaspora, local ou étranger, payent au prix fort les conséquences regrettables de la kokoratisation.

Mardi 24 septembre 2019 ((rezonodwes.com))– Sur un plan macroéconomique, la peur, l’insécurité, les accidents, le transport désorganisé, l’absence du tourisme, la méfiance, les risques de maladies liées aux odeurs infectes, les énormes pertes de temps causées par les congestions routières et cette grossesse sociale ectopique, les inefficiences professionnelles, les crises énergétiques, sociales, économiques et politiques, sont entre autres les effets néfastes immédiats d’une société hautement kokoratisée.

La kokoratisation apporte des externalités négatives dans tous les secteurs et à tous les acteurs de la vie nationale. C’est dans ce contexte que l’immortel Dany Laferrière a utilisé la fameuse métaphore « des passagers dans un même avion » pour attirer l’attention sur la vision myope des gouvernants et des riches qui ne mesurent pas le risque collectif dans lequel tout le monde s’embarque. « Un avion en turbulence et qui finit par s’écraser ne fera pas de distinction entre les couleurs, les âges, le genre, les hommes ou les femmes de classes économiques ou d’affaires». Nous mourrons tous, dans l’indignité et dans la honte, si nous ne prenons pas l’option d’assurer des projets de justice sociale pour dékokoratiser le pays.

Mais aussi, les histoires de notre passé récent exposent, avec une sombre clarté, de multiples expériences scandaleuses qui ternissent notre image et qui nous avilissent à la face du monde civilisé. Des dizaines de scénarios macabres peuvent être listés, je vais juste capter l’attention du lecteur sur quelques-uns, suffisants pour nous en convaincre.

Constats scandaleux et révoltants : jusqu’à présent, il n’existe pas en Haïti un seul hôpital bien équipé qui inspire confiance aux citoyens pour garantir des services de santé adéquats et de standard international. Même les mieux lotis et les mieux nantis n’ont pu, certaines fois, sauver leurs vies, malgré leurs richesses et leurs positions influentes et prestigieuses.

Les capitaines du bateau ne sont pas exempts des effets néfastes de la kokoratisation

Trois tristes expériences patentes et regrettables sont relatées ici pour mettre en lumière notre précarité et notre indignité, générées par la petitesse de nos dirigeants.

  1. Le 4 avril 2018, Docteure Michaëlle Amédée Gédéon, ancienne ministre de la santé publique de 1999 à 2001, présidente de la Croix-Rouge Haïtienne, rendît l’âme suite à un accident de la route. La donneuse de soins en a souffert pendant plusieurs heures, puisqu’aucun hôpital dans le Sud ne pouvait lui offrir en retour des soins sanitaires que nécessitait son cas. Elle finît par succomber de ses blessures et ses douleurs à l’Hôpital Bernard Mevs.
  2. En avril 2012, le président bandit légal, Michel Martelly, a failli trépasser d’une embolie pulmonaire. Il y est échappé de justesse en atteignant, au bord du précipice, la Floride, pour se faire traiter de l’obstruction brusque du vaisseau irriguant son poumon.
  3. L’ancien président « menfoubin » René Gracia Préval se faisait soigner régulièrement de son hernie discale chez l’immortel Fidel Castro, car il ne pouvait faire confiance ni à son hôpital public ni à ceux du Centre-Ville, du Canapé Vert ou de l’Aéroport.

Ils sont légions, les pertes en vies humaines catastrophiques et horribles, occasionnées par des malaises bénins ou sérieux, résultant du comportements « kokorat » des officiels et des « riches » qui n’ont jamais compris que des minutes, des heures, une distance d’un kilomètre ou de 100 kilomètres peuvent casser ou tisser le fil frontière entre la vie et le trépas. Il n’est pas toujours évident de pouvoir accéder à la Floride, à Cuba ou à la République Voisine, en temps et lieu, par avion ou par hélicoptère. D’ailleurs, en plus de la course contre la montre, personne ne peut prévoir quel temps il fera plus tard. Autant concevoir et implémenter des projets d’infrastructures sociales, des services de santé de proximité et de qualité.

Riche ou pauvre, blanc ou noir, homme ou femme, simple citoyen ou officiel, nous sommes tous exposés à la grippe, à la fièvre, aux crises cardiaques, aux maladies pulmonaires, à l’hypertension, aux accidents. L’érection des hôpitaux, qui ne coûtent pas d’ailleurs les yeux de la tête, serait non seulement à l’avantage de la population mais aussi contribuerait à sauver les vies des hommes, des femmes et de leurs progénitures qui font leur beurre indécemment et cupidement dans la crasse, dans les coopérations malsaines et dans les caisses du trésor public.

Le nouvel hôpital[1] universitaire de Mirebalais (HUM), de 205 000 pieds carrés doté d’une capacité de 300 lits, financés par des philanthropes, a couté moins que 25 millions de dollars et a fonctionné pendant ses deux premières années avec seulement 12.5 millions de dollars. Un exemple éloquent pour comprendre que les fonds ne constitueraient pas l’obstacle fondamental à la construction des infrastructures vitales au pays.

Des milliards de dollars sont dilapidés par les principaux « dignitaires » du régime politique en place ; les organisations internationales gaspillent des centaines de millions de dollars dans des soi-disant « agences d’exécution » de projets publics ; les banques commerciales, les organismes autonomes et déconcentrés et les racketteurs du secteur privé génèrent, en permanence, des millions de dollars qu’ils expédient dans des paradis fiscaux en Europe et en Amérique du Nord.

Les cerveaux et les cœurs des hommes et des femmes qui dirigent ce pays et qui s’y enrichissent déloyalement sont tout bonnement rongés par un égoïsme et une stupidité extrême les menant dans un kokoratisme déchaîné et donc dans un suicide collectif.

Carly Dollin
carlydollin@gmail.com