Sur le macadam, la présence des figures politiques emblématiques de l’opposition pour exiger le départ anticipé de Jovenel Moise du pouvoir revigore la mobilisation. À Port-au-Prince, aux Gonaïves, au Cap-Haïtien, à Port-de-Paix, à Petit-Goave, la fièvre s’est propagée au terme d’une septième journée mouvementée qui, loin de s’affaiblir, traîne derrière elle, enthousiasme et détermination, au premier constat
Port-au-Prince, mercredi 13 février 2019 ((rezonodwes.com))–À Port-au-Prince, au soir du mardi, les messages enflammaient déjà les réseaux sociaux. L’opposition politique entend proposer une démonstration de force à l’acte VII de la mobilisation visant à forcer Jovenel Moise à la démission.
Sept (7) branches de manifestations à converger dans l’ère du Champs de Mars avec pour objectif de conquérir le Palais national, définissait le contenu de la communication. Cité Soleil, Pétion-Ville, Bel-Air, Croix-des-Bouquets, Tabarre, Kenscoff s’alignaient sur la liste des communes à ouvrir les hostilités, a dévoilé également la note.
Mercredi dès l’aube, certaines rues de la capitale offraient un visage convalescent. Le transport en commun se cherche, la course dans certains supermarchés constatée, des rues débarrassées de barricades auguraient une perspective optimiste pour la reprise, après sept jours de paralysie totale. Cependant, en milieu de journée, des évènements vont modifier la tendance. Des manifestations spontanées enregistrées dans plusieurs quartiers de la zone métropolitaine de Port-au-Prince ont fait bouger les lignes.
À Kenscoff, des milliers de manifestants ont foulé le bitume. Ils entendaient se faire distinguer dans l’univers des voix à réclamer la démission du Chef de l’État. Le mouvement a terminé sa course à Pétion-Ville.
Cocktail Molotov, pillages, affrontements, marathon
À Delmas, l’attaque contre les locaux de la Télévision nationale d’Haïti a provoqué la panique des employés. Des cocktails Molotov lancés par des individus dans l’enceinte de la TNH ont causé l’effervescence. Au moins 5 véhicules garés à l’intérieur du bâtiment ont été réduits en cendres.
À la Croix-des-Bouquets, une foule immense conduite par des leaders politiques impressionne. Youri Latortue, Rony Colin, ont remporté le marathon en avalant plusieurs kilomètres jusqu’au pied du Palais présidentiel. Le message du parlementaire était sans équivoque.’’ Le Président de la République, Jovenel Moise, doit constater son échec, il doit partir pour éviter le chaos, scandait le sénateur Latortue, auteur de la boîte de Pandore enfermant les secrets de dilapidation de fonds de Petro Caribe que des organisations internationales veulent passer sous silence. Lecture identique dressée par l’édile de la Croix des Bouquets visiblement épuisé.’’ Il est certain que les heures sont comptées pour Jovenel Moise, le peuple en a marre,criait Rony Colin.
Le Centre-Ville de Port-au-Prince offrait le théâtre inédit des mouvements de contestation populaire rappelant la matinée du 7 février 1986, quelques heures après la fuite du dictateur. L’épisode du Champs Mars témoigne de la résistance d’un vécu populaire constamment éprouvé. Des débordements, des casses, des actes de violence menaçaient la fin de la mobilisation, sans décourager l’ardeur des manifestants, pouvait-on observer.
Le périmètre du Palais national, constamment convoité par des protestataires, a contraint les forces de l’ordre à redoubler de vigilance. Les dérapages entre manifestants et policiers, montant la garde du siège de la Présidence, n’ont pas été sans conséquences. Un mort dans le camp des manifestants, (un mort de plus) plus d’une dizaine de blessés dont une policière, des magasins mis à sacs, ont été recensés dans l’aire du Champs de Mars.
Des travailleurs de Presse qui assuraient la couverture de la manifestation n’ont pas été épargnés de la barbarie policière n’hésitant pas, comme c’est le cas à Petit-Goave, à tirer à hauteur d’homme. Josué Belamour (Radio Mega) et Robenson Sanon (Agence Reteurs) ont été atteints de projectiles. Celui-ci s’en remettra plus tard.
Des villes de province ont imité le mouvement
À l’instar de Port-au-Prince, d’autres villes du pays étaient également en ébullition. À Petit-Goave, des gens ont signifié leur désaccord face au pouvoir du protégé de Michel Joseph Martelly. Aux Gonaïves, la marche pour le départ de Jovenel Moise a pris l’ascendance.
Dans la foulée, l’Exécutif reste encore muet sur la levée de boucliers embrasant les régions du pays. L’horizon s’assombrit pour la suite du mandat constitutionnel du 58ème Chef d’État haïtien. Même s’il s’accroche à l’idée de boucler son quinquennat, pour réussir Jovenel Moise va devoir marcher sur des œufs. Mais sont-ils assez coriaces pour ne pas céder sous des pas coincés et pressants ?
Hervé Noël
vevenoel@gmail.om