3 décembre 2018 Rezo Nodwes
Bilan d’une saison cyclonique 2018 précoce, plus active que la moyenne et caractérisée par une faible pluviométrie en Haïti
Lundi 3 décembre 2018 ((rezonodwes.com))– Si dans le bassin de la Caraïbe, les habitants vivent avec le risque cyclonique depuis la nuit des temps, la population haïtienne et les autres nations antillaises ont été bel et bien échappées des risques hydrométéorologiques (sauf sécheresse) au cours de cette année.
En effet, la saison des ouragans de l’Atlantique Nord 2018 se termine officiellement ce vendredi 30 novembre et a connu une activité supérieure à la normale, même si l’arc antillais n’a pas été réellement concerné. Haïti a été une nouvelle fois chanceuse et épargnée des aléas de cette saison. On se souvient de la plupart des ouragans Florence et Michael, qui ont causé des dégâts importants sur le sud-est des États-Unis. Au total, la saison cyclonique 2018 a produit 15 tempêtes nommées, dont huit ouragans parmi lesquels deux étaient « Majeurs » ou de catégorie 3. Il est à signaler qu’une saison moyenne compte douze tempêtes, six ouragans et trois ouragans majeurs. Pour cette, d’Alberto en mai à Oscar en octobre, la saison cyclonique 2018 a été plus active que la normale.
Cette saison des ouragans a été qualifiée de précoce parce qu’on a enregistré la formation d’un cyclone, soit celui baptisé d’Alberto en Mai 2018, avant même le premier juin qui est la date du début de ladite saison.
Pour ce qui est des Antilles, deux ouragans de catégories 1 ont touché terre. Il s’agit de « Beryl et Isaac ». Mais ils avaient heureusement perdu de force. En juillet, Beryl est passé sur la Guadeloupe au stade d’onde tropicale alors qu’Isaac est passé au stade de tempête tropicale forte. Compte tenu de sa trajectoire, la Guadeloupe avait été passée en vigilance rouge tandis que les îles du Nord ont été en vigilance orange. Ce dernier classement avait été décidé du fait de la fragilité de Saint-Martin. D’ailleurs, le maximum de vent pour Isaac a été enregistré à Saint-Barthélemy, soit une rafale à 96 km/h, ce qui n’est pas énorme.
Les phénomènes ont faibli à l’approche de l’arc antillais en raison de ce que les météorologistes appellent le cisaillement: des vents forts en altitude qui déstructurent le système en question.
La saison cyclonique a aussi été marquée par la puissante houle qui a déferlé sur les côtes des Antilles en septembre. Cette houle a été provoquée par l’ouragan baptisé « Leslie » qui tournait en rond au milieu de l’Atlantique, à plus de 1000 km de Saint-Barthélemy. On noter que les houles se prévoient plus facilement que les tempêtes. Un cyclone, même de faible catégorie, provoque des vents très forts sur certaines zones, ce qui soulève la mer. La houle peut se propager vraiment très loin. Par exemple, les houles du nord que l’on a entre janvier et avril sont dues à des dépressions au nord.
Il est important de préciser une autre particularité de la saison cyclonique de 2018. En effet, cette année, sept systèmes sont devenus subtropicaux. C’est un record, le précédent étant de cinq en 1969. C’est la première fois qu’on voit autant de systèmes hybrides dans l’Atlantique.
A titre de rappel, les prévisionnistes annonçaient tous une saison proche de la normale, elle aura finalement été plus active que cela. « Ces prévisions de début de saison ne veulent pas dire grand-chose de toute façon ».
Si la saison cyclonique n’a pas eu de phénomènes dangereux et a été agréable pour les zones à haut risque d’inondations, tel n’est pas le cas pour les zones à potentialités agricoles. Car, ces zones de production n’ont pas reçu de pluies pour alimenter les systèmes de cultures surtout dans les zones montagneuses. En fait, dans les différentes régions géographiques du pays, la saison sèche semblait enfin se profiler avec une tendance déficitaire en pluie. Par exemple, les agriculteurs de Fondwa (quartier de Léogane) et de Kenscoff n’ont pas pu répondre aux périodes traditionnelles des différentes phases d’itinéraires techniques de leurs parcelles agricoles à cause de la sécheresse prolongée.
C’est pourquoi on dit que la saison cyclonique 2018 est caractérisée par une pluviométrie très faible. Autrement dit, le bilan pluviométrique des six derniers mois indique qu’il n’y a pas eu suffisamment de pluies qui pouvaient alimenter la production agricole et pour satisfaire les autres besoins de la population en eau surtout dans les zones de montagne. Ainsi, la tendance déficitaire préalablement annoncée se vérifie et le déficit de pluie tourne autour de -50% environ. Ce qui pourra entraîner une incidence négative sur la production agricole nationale du pays et ce qui pourrait provoquer une situation d’insécurité alimentaire encore plus poussée au sein de la population haïtienne. De plus, les prévisions de températures ont été plus incertaines et il faisait un peu plus chaud au cours de cette saison.
Ainsi, compte tenu de la variabilité de la pluviométrie et de la précocité de la saison cyclonique, il est recommandé aux autorités et à l’Université de réaliser des travaux de recherche continue afin de bien étudier l’évolution des paramètres et des facteurs du climat en Haïti. Ce qui pourra faciliter l’adoption d’un nouveau calendrier cultural pour chaque région agro-climatique en Haïti. Sur ce, les agriculteurs haïtiens seront mieux avisés et mieux préparés pour faire face aux éventuelles perturbations au cours d’une saison cyclonique.
En deuxième lieu, avec la sécheresse prolongée pendant ces derniers mois, on doit s’attendre à une faim aigue ou à l’insécurité alimentaire à travers le pays. En conséquence, les responsables doivent mobiliser des ressources alimentaires au profit de la population tout en prenant de nouvelles mesures pour relancer le secteur agricole en Haïti.
Enfin, il est important de souligner que, la plupart du temps ou à chaque saison cyclonique, Haïti fait toujours l’objet de trois risques majeurs : 1) Tremblement de terre, 2) cyclone et 3) sécheresse. Alors, il est vivement recommandé aux autorités établies de concevoir et de mettre en œuvre un plan de contingence multirisque afin de bien protéger la population haïtienne.
Talot BERTRAND, Ing-Agr.
Spécialiste en Education Relative à l’Environnement
Secrétaire Général de la PROMODEV
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