Quand est-ce que le pays sera réellement prêt ?

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08 octobre 2018

Des blessés dorment sous une tente à Port-de-Paix Photo : Reuters/Ricardo Rojas

Le bilan s’alourdit en Haïti. Environ une quinzaine de morts, 333 blessés, et 7 000 maisons sont soit détruites ou endommagées pour un séisme de 5.9 qui n’a duré que quelques secondes et touché principalement deux départements. Pourtant, d’autres pays ont l’habitude de vivre des séismes de niveau 6 sans, pour autant, enregistrer aucune perte en vies humaines. On l’entend souvent. On le répète aussi. Le séisme n’est pas une fatalité, l’essentiel c’est d’être prêt à l’affronter.

Plusieurs observateurs pensent que le président de la République, Jovenel Moïse, devrait tirer leçon de sa déclaration lors de la 73e session ordinaire de l’Assemblée générale des Nations unies. Presque deux jours après l’enregistrement du séisme, la communauté internationale, à part le Canada, ne manifeste aucun engouement particulier à fournir de l’aide. Pas la peine, le président de la République avait lui-même déclaré, en face de ces dirigeants internationaux, que son pays était mieux préparé à affronter les catastrophes.

Pourtant, l’hôpital le plus important de la ville de Port-de-Paix n’a pas la capacité de fournir des soins d’urgences parce qu’il est fissuré, parce qu’il manque de matériels. Qu’il s’agit de lit, gants, oxygènes, toile à gaz, etc., l’hôpital est dépourvu de matériels pouvant aider à sauver une vie. Même constat au niveau de tous les autres centres hospitaliers publics du pays. Et c’est la raison pour laquelle les médecins, notamment les résidents au sein de ces centres hospitaliers sont toujours en grève. Ce qui est étonnant, en dépit de cette situation qui empêche le bon fonctionnement des hôpitaux, les autorités étatiques ont jugé bon de diminuer le budget de fonctionnement du MSPP, pour augmenter ceux de la Primature et du Palais national.

Le pays est arrivé à un carrefour où il faut des actions concrètes, au lieu de la propagande. Au 21e siècle, c’est inutile d’essayer de faire croire qu’on est en train de travailler et que les résultats sont satisfaisants alors que la réalité sur le terrain en dit le contraire. Quelques heures après le séisme, le président de la République a expliqué sur sa page twitter qu’il est en train de travailler avec la Protection civile, et que des équipes sont déjà sur le terrain pour apporter de l’aide aux victimes.

En réalité, il faut plus pour venir en aide aux victimes. C’est inutile pour un président de la République et un Premier ministre de débarquer dans un hôpital où des victimes d’une catastrophe espèrent l’arrivée des lots de matériels sanitaires, et ainsi attendent la présence des médecins qui, pour la plupart, ne sont pas présentés parce qu’ils ne perçoivent pas leur salaire de manière régulière.

Aucun des messages sur le compte Twitter officiel du chef de l’État n’a indiqué des actions concrètes entreprises par l’Administration pour gérer l’urgence. Aucun de ces messages ne concerne le décaissement de l’argent l’achat des matériels pour les hôpitaux publics du pays, d’autant plus qu’on est en période cyclonique, il pourrait y avoir à n’importe quel moment des cas qui nécessitent des soins d’urgences. Tous les messages concernent sa présence sur le terrain. « Je suis par-ci, je suis par là pour apporter une aide aux victimes ». L’intérêt de cette Administration, selon plusieurs internautes, c’est le m’as-tu-vu. Faire comprendre aux gens qu’elle est en train de travailler sans rien entreprendre réellement.

Le chef de l’État a même exhorté la population à garder son calme, suite au passage du séisme. Mais comment exhorter une population à rester calme face à de catastrophes mortelles, et que rien n’a été fait pour éviter les dommages ni pour gérer l’urgence en cas d’éventuels dommages. Les gens sont au courant que les hôpitaux publics sont très mal équipés. Tout le monde sait que les soins d’urgences de qualités sont très rares en Haïti. C’est peut-être l’une des raisons pour laquelle tout le monde veut à tout prix éviter les situations qui pourraient causer leur admission dans une salle d’urgence.

L’ingénieur géologue Claude Prepetit indique que l’énergie que pourrait dégager la faille septentrionale en cas d’un séisme majeur est l’équivalent de l’énergie libérée par 900 bombes atomiques. Alors, est-ce que les dirigeants haïtiens vont continuer à adopter ce comportement de pompier ou ils vont enfin décider d’adopter un plan réel de gestion de catastrophes naturelles dans ce pays ?

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