4 octobre 2018 Rezo Nodwes
Je vais sûrement me faire des ennemis, mais je m’en moque. Au fait, ici nous aimons les drames de famille qui, souvent, font l’objet de nos blagues et rires. Pauvres nous!
par Woodkend Eugène
Jeudi 4 octobre 2018 ((rezonodwes.com))– Il y a quelques mois, ce fût le cas de Marlène Collin poignardée à mort par son compagnon à Jacmel. Aujourd’hui, c’est le cas de Nice Simon, maire de son état, impitoyablement battue par son compagnon. Avant elles, il y avait d’autres cas, étouffés ou ébruités.
Après elles, il y aura probablement d’autres cas. Mais, à chaque fois, je suis toujours sidéré par la manière dont les sexistes d’ici (tant mâles que femelles) récupèrent ces drames de couple pour régler leur compte ou trouver un exécutoire à leurs frustrations personnelles ou de genre, sans considérations pour la grande détresse psychologique que vivent les personnes directement concernées par ces violences (père, mère et enfants).
Sur les faits relatifs à l’agression de Mme Simon, ma position est arrêtée : l’agresseur doit payer pour son forfait, à la dimension de la sauvagerie qui caractérise son acte et selon les prescrits de la Loi. Zéro tolérance! Débat clos! Maintenant, pour ce qui a trait aux palabres sur les réseaux sociaux, je ne puis me taire devant la méchanceté des commentaires et publications qui pullulent sur la toile, dans un sens ou un autre, à chaque fois qu’il y a ces drames de couple.
Je vais sûrement me faire des ennemis, mais je m’en moque. Au fait, ici nous aimons les drames de famille qui, souvent, font l’objet de nos blagues et rires. Pauvres nous! Nous aimons ces drames parce qu’ils donnent à certains d’entre nous, notamment les sexistes mâles, l’occasion de réaffirmer leur machisme primaire en dénigrant et en prenant revanche sur la femme en général à cause d’une femme avec laquelle ils ont eu une relation qui a mal tourné.
Nous aimons ces drames parce qu’ils fournissent à certains d’entre nous, notamment les sexistes femelles (je ne parle pas des féministes. Les vrais) de la matière pour alimenter leurs statistiques et justifier des demandes de financement pour des programmes d’accompagnement de femmes victimes.
Presque pas de programmes de prévention des violences conjugales, mais toujours des programmes d’accompagnement des victimes. Des Interventions à posteriori. C’est la femme victime qui intéresse. Juste une unité statistique. Pas question de comprendre et d’agir sur les causes. La réponse est déjà connue: c’est le machisme haïtien. Et c’est réglé. Simpliste!
Avec ces aprioris et ces explications plutôt naïves, nous passons à côté de la complexité des relations humaines et sentimentales. Mais pire que cela, nous négligeons et crachons sur la souffrance de la famille dramatisée en jouant aux moralistes émotifs et intéressés. Oui, derrière chaque violence conjugale, il y a la souffrance de toute une famille. Une famille qui s’aimait. Un homme et une femme qui se sont rencontrés, se sont aimés et se sont sentis heureux ensemble, mais qui ont fini par perdre contrôle sur leur relation jusqu’à ce qu’elle dérape totalement, à cause de raisons diverses. Ça n’excuse pas le forfait, mais ça invite à l’empathie.
Derrière chaque drame de couple, il y a un-e partenaire anciennement aimable qui devient un bourreau et qui doit payer pour ses actes. Il y a un-e autre partenaire victime qui se sent souillé-e dans sa dignité d’être humain et qui souffre. Mais il y a surtout de pauvres enfants qui seront à tout jamais marqués et traumatisés par la déchirante histoire de leurs parents, ou par la méchanceté de nos commentaires.
Ça n’excuse pas le forfait, mais ça invite à l’empathie. Pensez-y!
Justice pour Nice! Condamnation pour Léonard! Bienveillance pour leur fils!
Woodkend Eugène, 4 oct 2018.