By: Rezo Nodwes 12 juin 2022
27ème Anniversaire de la PNH : Le RNDDH exige de meilleures conditions de travail en faveur des policiers-ères
par RNDDH
Le 12 juin 2022 ramène la commémoration des vingt-sept (27) années d’existence de la Police Nationale d’Haïti (PNH). A cette occasion, le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) tient à attirer l’attention de la population sur les cas récurrents d’assassinats de policiers, les conditions générales de travail des agents-tes de la PNH et sur l’inaccessibilité des soins de santé pour les policiers-ères.
Dimanche 11 juin 2022 ((rezonodwes.com))– Depuis plusieurs années, il est constaté que l’institution policière ne peut faire face aux difficultés auxquelles est confrontée la population haïtienne : l’insécurité bat son plein, les bandits sont aux commandes et tous les citoyens-nes sont exposés, dont les policiers et policières eux-mêmes. Ils sont assassinés ou enlevés et séquestrés contre rançon, des postes de police ainsi que des patrouilles fixes ou mobiles sont attaqués par des bandits armés, leurs véhicules sont volés, etc.
En effet, du 17 juin 2021 au 6 juin 2022, au moins quarante-quatre (44) agents de la PNH ont été assassinés, vingt-et-un (21) d’entre eux, seulement du 1er janvier au 6 juin 2022, soit une moyenne de quatre (4) policiers par mois. Au moins onze (11) attaques armées de postes de police et de patrouilles fixes ou mobiles ont été enregistrées. Ainsi, la Police Nationale d’Haïti (PNH) ne peut assurer sa mission qui consiste à « protéger les vies et les biens », pour son propre compte.
A côté de tout cela, les conditions dans lesquelles les agents de la PNH sont appelés à travailler sont inacceptables : insuffisance de matériels d’intervention, locaux en mauvais état, absence de véhicules roulants d’une part, inefficacité de la couverture d’assurance-maladie et incapacité à trouver les soins de santé nécessaires, d’autre part.
Ces conditions difficiles de travail portent plusieurs agents-tes à déserter les rangs de l’institution policière. Ils sont en effet nombreux ceux qui, lorsqu’ils le peuvent, choisissent de se réfugier ailleurs, sans que cela ne semble alerter les autorités étatiques. Rien que pour le mois d’avril 2022, cinq cents (500) chèques environ ont été retournés à la direction du personnel de la PNH, pour acheminement au Ministère de l’Economie et des Finances, les concernés-es ne s’étant pas présentés en vue de les réclamer.
Tant à Port-au-Prince que dans les villes de province, les agents-tes de la PNH ne disposent pas de matériels adéquats ni suffisants pour effectuer convenablement leur travail :
Les policiers-ères des zones reculées n’ont aucun moyen de transport à leur disposition. Certains agents-tes effectuent les patrouilles à pied, tel est le cas des agents-tes de la PNH affectés aux sous-commissariats de Marbial, Sud-est et de Furcy, Ouest, par exemple. D’autres utilisent les motocyclettes de transport en commun, pour se déplacer d’un lieu à un autre.
Les agents de la PNH n’ont ni gilets pare-balles, ni casques, ni menottes, ni cirés imperméables, ni munitions, suffisants. Les radios de communication sont pour la majorité, défectueuses et de nombreux véhicules de patrouille sont en panne.
Les bâtiments de nombreux commissariats et sous-commissariats sont en très mauvais état. Par exemple :
• Le sous-commissariat de Cazeau, Ouest est souvent inondé lors des saisons pluvieuses, portant les agents-tes qui y sont affectés, à se réfugier à l’étage en attendant de pouvoir procéder au nettoyage du rez-de-chaussée ;
• La toiture des postes de police de Bahon, Nord et de Maïssade, Centre étant trouée, les policiers-ères qui y sont affectés ne peuvent travailler lors des pluies ;
• Le bâtiment du commissariat de Miragoâne, Nippes, construit sous le régime des Duvalier, a été sérieusement endommagé par les séismes des 12 janvier 2010 et 14 août 2021. Le 4 mars 2022, les autorités ont dû transférer temporairement ledit commissariat à la délégation des Nippes, mais aucun travail d’aménagement n’est enregistré à date ;
• Les fenêtres du sous-commissariat de Furcy, Ouest, sont cassées depuis quelque temps, mais n’ont jamais été réparées. Lorsqu’il pleut, les policiers-ères qui y sont affectés les barrent avec des morceaux de carton ou des sachets en plastique, pour éviter que le local ne s’inonde.
D’autres difficultés ont aussi été rapportées aux moniteurs-trices du RNDDH :
• Les sous-commissariats des zones reculées ne disposent pas de personnel de soutien. C’est aux policiers-ères – généralement en nombre insuffisant – qu’il revient d’assurer le nettoyage des locaux en question. Certaines rares fois, des membres de la communauté se portent volontaires pour exécuter ces tâches ;
• A Maïssade, Centre, les policiers-ères se baignent à la rivière, située à une centaine de mètres du commissariat ;
• Certains postes de police ne disposent pas de dortoir pour les policiers-ères. Tel est le cas du sous-commissariat de Pérédo, Sud-est où l’une des deux (2) cellules de garde-à-vue est utilisée à cet effet, par les policiers-ères qui y sont affectés ;
• Certains postes de police, comme celui de Pernier, Ouest, n’ont pas de dortoir
pour les policières. Ces dernières sont logées en dortoirs mixtes ;
• Les dortoirs des policiers-ères sont sous-équipés. Les lits souvent usés et sales, sont insuffisants.
Il a aussi été rapporté au RNDDH que sous l’administration de Jovenel MOÏSE, en Conseil des ministres, il a été décidé de subordonner toute dépense de la Direction Générale de la PNH, dépassant cinquante mille (50.000) gourdes, à l’aval du Ministère de l’Economie et des Finances. Il s’agit-là d’une décision entravant le fonctionnement de l’institution policière. De plus, convient-il de le rappeler, la PNH est placée sous la tutelle du Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique.
Par ailleurs, entre 2019 et 2021, des policiers-ères notamment ceux du SPNH-17 ont fait l’objet d’actes de persécution, à travers des décisions qui ont été prises à leur encontre. Certains ont été révoqués, d’autres ont été incarcérés.
Les autorités policières rencontrées tant au niveau des différentes directions départementales qu’au niveau de l’Inspection Générale de la PNH, ont affirmé au RNDDH avoir une bonne connaissance des difficultés auxquelles l’institution policière fait face. Si pour quelques directions départementales, des changements sont en cours de planification, en vue de répondre à certains besoins des policiers-ères, pourl’Inspection Générale de la PNH, des mesures de redressement sont en cours d’opérationnalisation en vue de redorer le blason de l’institution policière, d’améliorer les conditions de travail des agents-tes de la PNH et de fournir une assistance aux familles des policiers assassinés, au-delà des funérailles. Cependant, entre planification et opérationnalisation des changements, les policiers-ères continuent de faire les frais du fonctionnement bancal de l’institution.
Enfin, même si cet aspect n’est pas abordé dans ce document, il convient de souligner que des cas de suicide sont de plus en plus enregistrés dans les rangs de l’institution policière.
Fort de tout ce qui précède, le RNDDH recommande aux autorités étatiques de :
• Fournir moyens suffisants et adéquats aux policiers-ères pour l’accomplissement de leurs tâches : armes, munitions, gilets pare-balles, motocyclettes, véhicules de services, etc. ;
• Annuler la décision prise en Conseil des Ministres de soumettre à l’aval du Ministère de l’Economie et des Finances, les dépenses de la Direction Générale de la PNH, dépassant cinquante-mille (50.000) gourdes ;
• Assister les familles des policiers-ères assassinés, au-delà des funérailles ;
• Repenser la couverture d’assurance-maladie des policiers-ères ;
• Rendre fonctionnel l’Hôpital Central de la Police Nationale ;
• Mettre fin à l’alimentation en armes et en munitions des gangs armés qui attaquent continuellement les agents-tes de la PNH en particulier et la population en général ;
• Réviser les dossiers des policiers-ères contre lesquels des mesures arbitraires ont été prises entre 2019 et 2021.
(Extrait du rapport du RNDDH)