By Rezo Nodwes -15 juin 2020
Autour du débat sur la fin du mandat du président Jovenel Moise, le Bureau Intégré des Nations Unies en Haiti (Binuh) affirme n’avoir aucunement vocation à se substituer aux institutions nationales dans l’interprétation de la Constitution haïtienne. Le Binuh voit dans une éventuelle réforme constitutionnelle une opportunité pour relancer le pays et a profité pour renouveler son engagement pour la promotion de concertations consensuelles tendant à l’accomplissement d’un cadre constitutionnel rénové, partagé et fédérateur.
Lundi 15 juin 2020 ((rezonodwes.com))– Haïti subit, depuis plusieurs années, de multiples crises concomitantes et interconnectées qui ne cessent d’attiser les tensions au sein de sa société. Le climat politique qui en résulte empêche le pays de se concentrer sur les déficits de développement et les défis majeurs auxquels il est confronté, que ce soit sa croissance économique atone, une pauvreté rampante, des inégalités grandissantes, une insécurité grimpante, une impunité manifeste, et la dégradation de ses ressources naturelles.
La plupart des institutions du pays peinent à apporter des réponses adéquates à la souffrance de sa population, dont les conditions de vie, déjà difficiles, se détériorent de jour en jour.
C’est dans ce contexte, aggravé par l’impact de la pandémie de la COVID-19, qu’a repris, avec une intensité renouvelée ces dernières semaines, la polémique autour de la durée du mandat des élus. Cette controverse trouve son origine, entre autres, dans les ambiguïtés d’une constitution qui, produit de son époque, peine à refléter la réalité et les besoins d’un pays qui a évolué au cours des trois dernières décennies.
Elle reflète également l’absence d’un conseil constitutionnel, seul apte à arbitrer de tels débats ; une illustration parmi d’autres des nombreux dysfonctionnements institutionnels qui paralysent l’action de l’Etat et le fragilisent davantage, avec de lourdes conséquences sur tous les aspects de la gouvernance du pays.
Depuis sa création à l’automne dernier, le Bureau Intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) n’a cessé de déployer ses efforts pour préserver et favoriser un environnement pacifique et stable par la promotion du dialogue, des droits de l’homme, de la stabilité politique et de la bonne gouvernance, s’inspirant des principes et des valeurs de la Charte des Nations Unies et conformément au mandat que lui a conféré le Conseil de Sécurité des Nations Unies le 25 juin 2019.
Si le BINUH n’a aucunement vocation à se substituer aux institutions nationales dans l’interprétation de la Constitution, il considère toutefois que, dans un régime démocratique, les élections représentent la seule voie d’alternance au pouvoir et que les mandats qui en découlent doivent être respectés par tous les acteurs de la société.
L’organisation périodique d’élections libres, crédibles et transparentes, conformément aux échéances fixées par une constitution, garantissent le pluralisme politique et les libertés fondamentales consacrés dans les instruments internationaux ratifiées par Haïti. Leur tenue constitue un pilier essentiel de la démocratie et est indispensable à la désignation de dirigeants légitimes et représentatifs.
Malgré ses effets néfastes sur l’ensemble de la vie nationale, la crise actuelle offre au pays une opportunité unique d’initier un cercle vertueux en rebâtissant des fondations solides et durables et en s’attaquant à l’un des nœuds gordiens qui entravent la marche en avant du pays. Une réforme constitutionnelle profonde permettrait de remédier aux défaillances du système de gouvernance actuel et de créer des conditions plus propices à la stabilité institutionnelle, à la bonne gouvernance, et au respect de l’état de droit; trois caractéristiques plus que jamais indispensables à l’essor du pays.
Alors que des interprétations différentes du dispositif constitutionnel alimentent le débat, la nécessité d’une réforme de la charte constitutionnelle fait l’objet d’un large consensus au sein de la société haïtienne. Il appartient donc aux différents acteurs de surmonter leurs différends afin de parvenir à un terrain d’entente permettant de la réaliser. Haïti a besoin que toutes ses forces vives soient fédérées pour le bien du pays et de sa population, et que les prochaines élections soient caractérisées par une participation active et responsable de tous.
Les Nations Unies en Haïti renouvellent leur engagement pour la promotion de concertations consensuelles tendant à l’accomplissement d’un cadre constitutionnel rénové, partagé et fédérateur. Nous nous tenons prêts à appuyer les institutions nationales et les différents acteurs dans l’organisation d’élections crédibles, transparentes et inclusives, contribuant à un retour à la normalité institutionnelle dans un climat apaisé.