Dimanche 5 avril 2020 – Le coronavirus (COVID-19) est arrivé en Afrique subsaharienne et les pouvoirs publics intensifient les mesures pour prévenir la propagation de la pandémie. Depuis plusieurs semaines, les voyageurs sont contrôlés par des caméras thermiques et des agents sanitaires ont été déployés pour renforcer la surveillance. Des dispositions ont été prises rapidement pour réduire le trafic aérien, fermer les écoles et les frontières, et limiter les rassemblements publics. Ce sont là des situations familières pour les nombreux pays africains qui ont tiré de douloureuses leçons de l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest en 2014, notamment la République démocratique du Congo, qui est enfin sur le point de remporter sa bataille contre le virus.
Détection rapide, dépistage précoce et intervention immédiate : ces facteurs sont cruciaux pour lutter contre la propagation des maladies infectieuses, et cela passe par une collaboration transfrontalière étroite et une forte solidarité entre pays voisins et au sein de la communauté internationale. Le combat contre la crise Ebola a appris aux pays africains combien il est important d’investir dans des systèmes de santé plus solides et des mécanismes de surveillance plus fiables pour faire face aux épidémies. S’ils veulent lutter efficacement contre le nouveau coronavirus, ils devront appliquer ensemble les enseignements tirés de cette expérience.
Direction le Sénégal et le Nigéria, où deux spécialistes de la santé nous ont expliqué ce qui est fait pour freiner la propagation de la pandémie sur le continent et s’y préparer.
La surveillance et le dépistage sont essentiels pour contenir la propagation
Au lendemain de la crise Ebola de 2014, la Banque mondiale a mobilisé plus de 600 millions de dollars pour lancer le programme REDISSE, une initiative régionale destinée à améliorer les systèmes de santé et la veille sanitaire dans 16 pays d’Afrique de l’Ouest et centrale.
L’Institut Pasteur de Dakar a été l’un des premiers laboratoires du continent à être accrédité par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour réaliser les tests Covid-19. Les équipes de l’Institut ont commencé à s’y préparer dès janvier, car le laboratoire est habitué à traiter des flambées épidémiques similaires. « L’OMS nous a confié une mission régionale. Depuis, nous avons formé 25 laboratoires et un autre institut en Afrique du Sud en a formé environ 18 autres. Il y a maintenant plus de 30 laboratoires dans la région qui sont capables de tester le coronavirus », explique le Dr Amadou Alpha Sall, directeur général de l’Institut Pasteur de Dakar.
Grâce au programme REDISSE, l’Institut Pasteur a pu optimiser son système de surveillance en se procurant davantage de matériel de laboratoire pour le dépistage, notamment des équipements de biosécurité, afin d’augmenter ses capacités de réalisation de tests et de garantir le respect de protocoles de sécurité et de qualité pour leur mise en œuvre. « Nous avons pu améliorer nos systèmes de surveillance pour un grand nombre de maladies et sur l’ensemble du pays. Les équipements fournis nous permettront d’assurer des dépistages rapides et d’améliorer notre capacité à mobiliser des ressources et à réagir à des flambées épidémiques comme celle du coronavirus », ajoute le Dr Alpha Sall.
Travailler ensemble pour se préparer et intervenir rapidement
Selon le Dr John Oladejo, directeur de la préparation et de la réponse aux urgences sanitaires au Centre nigérian de contrôle des maladies (NCDC), la coordination entre tous les partenaires à l’intérieur des pays et au-delà des frontières est primordiale pour prévenir la propagation d’une épidémie. Depuis 2017, la Banque mondiale apporte son soutien au NCDC pour renforcer la capacité du Nigéria à prévenir, détecter rapidement, anticiper et répondre aux épidémies.
« Quand le coronavirus a fait son apparition, nous avons créé un groupe de travail technique pour nous préparer. Tous les partenaires ont été associés et nous nous sommes penchés sur l’état des infrastructures et des stocks de médicaments, ainsi que sur les points d’entrée d’où viendraient le plus probablement les cas suspects. Le premier cas suspect s’est déclaré dès février, et nous avons rapidement lancé notre centre d’opérations d’urgence. Nous avons finalisé notre plan d’intervention et l’avons suivi à la lettre pour nous assurer de ne rien laisser au hasard. La Banque mondiale, l’UNICEF, l’OMS et le NCDC ont travaillé la main dans la main pour y parvenir », témoigne le Dr Oladejo.
Aux côtés d’autres partenaires régionaux, la Banque mondiale aide les pays à prendre les mesures nécessaires pour combattre cette menace mondiale. La semaine dernière, une enveloppe de financement accéléré de 14 milliards de dollars a été approuvée afin d’accompagner les efforts déployés par les entreprises et les pays en vue de prévenir, détecter et faire face à la propagation rapide de la pandémie de Covid-19. Cet appui permettra de renforcer la préparation des systèmes nationaux aux urgences de santé publique, ce qui comprend notamment la lutte contre la diffusion de la maladie, le diagnostic et les traitements, mais aussi de soutenir le secteur privé.
« Avec la crise Ebola, l’Afrique a été à rude école », souligne Hafez Ghanem, vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique. « Alors que la pandémie de Covid-19 continue de progresser, nous utilisons tous les instruments et l’expertise disponibles pour répondre aux besoins des pays, en donnant la priorité aux plus pauvres et aux plus vulnérables. »
La Banque mondiale vient d’approuver une enveloppe de financements à décaissement rapide d’un montant global de près de 370 millions de dollars pour lutter contre le coronavirus dans 10 pays africains. D’autres engagements sont prévus dans les semaines et les mois à venir. Ces efforts viennent compléter les projets qui s’emploient déjà à renforcer les systèmes de santé nationaux ainsi que plusieurs programmes régionaux dédiés à la lutte contre les épidémies dans les pays d’Afrique de l’Ouest et centrale. À l’image du REDISSE et, plus récemment, du nouveau projet régional de financement des Centres africains de contrôle et de prévention des maladies (a), dont l’objectif est de renforcer les systèmes de surveillance, de prévention et d’intervention d’urgence sur l’ensemble du continent.
Photo: Miriam Schneidman
Banque mondiale & OMS/RDC