Mon pays c’est Ayiti, Terre Haute et non Haïti, Haïr les tiens!

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30 avril 2019Rezo Nodwes

Ayiti, Mon Pays! par Garry Muzeau

Lundi 30 avril 2019 ((rezonodwes.com))– J’ai beau creuser dans mes souvenirs, j’ai beau consulter les notes de compatriotes érudits, je n’ai trouvé jusqu’à date aucune explication sur la nomenclature du mot Haiti, ni le nom de celui qui décida de modifier, je ne sais quand, son orthographe.Tout ce dont je suis certain, c’est qu’au 1er Janvier 1804 le mot Haiti signifiant en Taino, terre haute s’écrivait Ayiti et non Haiti avec la connotation de haïr les tiens.

D’aucuns s’accorderont pour ignorer l’importance d’un tel tour de passe-passe mais pour ceux, qui comme moi, reconnaissent que les mots génèrent des fluides tantôt négatives, tantôt positives, le nom de notre mère-patrie semble porter en lui-même les germes de nos discordes perpétuelles et de notre incapacité proverbiale à nous comporter comme une communauté soudée et soucieuse du bien-être collectif. Cette tare s’est immiscée dans nos mœurs indubitablement après la mort tragique du fondateur de la nation et s’est imposée en système a plein effet après la disparition d’Henri Christophe. Et depuis, Haiti, livrée aux caprices assassines de la France par Boyer et les sbires de Pétion entra à nouveau dans le cycle du colonialisme. Quelle victoire éclatante nos dirigeants de l’époque offrirent à nos oppresseurs d’hier lorsque les rênes de notre système d’éducation leur furent confiées.  

A la naissance de notre nation, nous héritâmes de combien d’écoles primaires, de combien d’hôpitaux, de combien de lycées, de combien d’universités De presque rien. Que nous ont-ils apporté à leur retour? Le basique qui consiste à apprendre à lire, à écrire et à compter tandis que la propension à enrichir le cerveau haïtien par la conceptualisation, l’élaboration et l’exécution d’idées innovantes n’a jamais été une préoccupation de nos formateurs. Cependant des punitions absurdes et même disproportionnées nous étaient réservées quant au mauvais usage de la langue française.  Un cauchemar que les dirigeants auraient pu nous éviter si la langue officielle d’Haïti était le créole. Une telle disposition aurait résolu tant de disparités dans le pays. L’uniformité linguistique aurait fait disparaître l’arrogance de se croire appartenir a une classe supérieure juste en s’exprimant bien dans la langue française.

Nous sommes soi-disant indépendants depuis plus de deux siècles et loin de connaître une évolution graduelle tendant à nous sortir des ornières du sous-développement en nous libérant des chaînes de la dépendance par le refus catégorique du diktat de l’extérieur grâce à un projet d’épanouissement haïtien prenant en compte nos différences, nos sensibilités et nos aspirations communes réelles, nous continuons à nous assujettir aux conseils incongrus, à des vues de l’esprit fumistes non conciliables avec la réalité de notre population pour bénéficier d’une aide étrangère qui nous est fournie selon un agenda produit par les donateurs pour mieux nous contrôler.

Nous nous complaisons à recevoir une aide qui en vrai ne nous aide en rien puisqu’elle est accouplée à des conditions qui nous dévalorisent toujours et  nous transforment généralement en cobaye pour l’expérimentation de théories destinées à produire tel résultat escompté. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale et l’émergence du principe de l’aide internationale, quel pas concret avons-nous effectué? N’est pas la preuve tangible et palpable que nous ne sommes pas pris en compte ni dans le partage du gâteau, ni dans les considérations géopolitiques. Au lieu de Singapour, au lieu de la Corée du Sud, pourquoi Haïti n’a-t-il pas reçu les investissements qui ont littéralement transformé ces pays même pour donner le change à Cuba qui avait décidé de basculer dans le camp soviétique? Haïti est propice à la production d’ananas, de canne-à-sucre, pourquoi n’a-t-il bénéficie d’aucun appui digne de ce nom pour connaitre une réelle émancipation.Tout au long de son histoire, la terre d’Haïti a été victime d’ostracisme, c’est un coin de terre qui ne peut compter que sur les compétences de ses enfants pour espérer connaître des jours meilleurs. Apportons-y notre pactole.

Nous voici arrivés au 1er Mai, jour que nous avons choisi pour célébrer à l’instar de la France le jour du travail. Et dans dix-sept jours nous commémorerons l’anniversaire de la création de notre bicolore. J’ose espérer que cette date revêtira à nos yeux toute sa pleine et entière signification surtout celle de personnifier l’orgueil et la fierté d’une bande de nègres déshumanisés, affublés de tous les titres innommables qui ont fait mentir toutes les théories racistes de l’heure pour s’élever avec panache à la dignité d’hommes libres, exploit jusque-la inédit dans les annales de l’histoire moderne de l’humanité. En ce jour qui, chaque année, fait dresser les cheveux sur ma tête et tressaillir toutes les fibres de mon cœur comme il serait doux et réconfortant qu’une étincelle d’espoir pour un vrai renouveau national puisse le temps de le dire scintiller pour annoncer le départ définitif de notre marche vers l’unité et le progrès.

La fuite sans cesse croissante de tous nos esprits valables vers des cieux plus cléments pour des raisons politiques, économiques ou autres a mis Haïti  en panne sèche de valeurs sûres vraiment capables d’assurer la relève et cet état de fait perdure depuis les premières années du règne des Duvalier. En faisant le calcul simple de 2019-1958, cela fait soixante et un ans depuis que le réservoir national de compétences se vide sans remplissage et cela équivaut également au nombre d’années que l’enthousiasme et la militance remplacent la compétence. Dans un tel environnement comment espérer que le mieux-être soit au rendez-vous. Pour ceux qui ne s’expliquent pas la précarité et l’incapacité de produire des résultats auxquelles le pays est confronté la réponse est simple:un pays produit proportionnellement à la performance de son système de formation.Si le système est riche la productivité sera riche. Dans le cas contraire, il s’achemine inéluctablement vers la contre-performance et le chaos. 

Un pays où vivent des hommes, des hommes dans toute l’acceptation du terme c’est-à-dire qui sont pleinement imbus de la notion de se sentir responsables même devant une misère qui ne semble pas provenir d’eux, qui connaissent la honte devant les difficultés que confrontent les mandants et qui s’évertuent à leur créer un environnement plus serein pour vivre. En l’absence de ces valeurs qui doivent caractériser  nos gouvernants, peut on affubler l’Haiti actuelle qui se meut comme un fantôme meurtri, exsangue et complètement désorienté du pompeux titre de pays? Au nom de son passé glorieux j’affirmerais que oui. Ce passé a été grand, il peut redevenir grand. Pour ce faire il suffit qu’un homme porteur d’un rêve aussi grand que ce pays qui l’a vu naître en soit aux commandes tout en étant entouré d’une équipe de courageux compatriotes compétents, respectueux des valeurs et des biens de l’état, imprégnés de qualités indispensables à la bonne gestion ces qualités que le contact des malins et des coquins n’a ni le pouvoir ni la capacité d’altérer.

Haïti a produit Capois-la-mort, il a vu naître Dessalines, il a produit Christophe et ce pays n’est pas encore stérile. Il n’est que d’attendre, Il émergera indubitablement et ce avant qu’il ne soit trop tard celui à qui sera assignée la mission sacrée de mettre les pendules à l’heure dans tous les segments de la vie nationale pour sauver ma tendre et chère Haïti.

Garry Muzeau
Garry@toursinhaiti.comwww.toursinhaiti.com
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